Dévotion

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Dévotion AG2R LA MONDIALE

J’aime la façon dont Philippe Brunel écrit sur la profession de coureur cycliste dans l’Équipe. Il parle de dévotion, de sacrifice. D’amour pour un métier si dur. Il en perce les secrets et les souffrances. J’ai toujours été fasciné par la faculté de ces hommes à repousser la souffrance pour accomplir leur mission sportive.

Le cyclisme vit au quotidien autour de  valeurs qui dépassent l’univers du commun des mortels.

Le Tour de France, sa représentation la plus jusqu’au boutiste, joue de ces excès et de cette dramaturgie hors normes. Aujourd’hui, la Grande Boucle, impitoyable, a châtié ses plus fervents fidèles. La chute, terrible, a laissé sur le goudron râpeux de Belgique, de nombreuses victimes. Le maillot jaune est l’une d’entre elles et le cœur du Tour s’est affolé.

Fallait-il ou non neutraliser le peloton? Cela fait partie des sujets qui passionnent le micro-cosme avant qu’un autre le chasse dans la grande roulette de juillet.

Être coureur cycliste, c’est aller au bout de ses forces. Coûte que coûte. Johan Vansummeren est un dur au mal. Le grand Flahute de notre équipe est un de ces bouffeurs de pavés qui aiment les courses viriles comme seul le Nord de l’Europe sait en produire. « Des journées qui font le tri entre les hommes et les garçons » fanfaronne parfois Jan Bakelants, l’autre Belge du groupe.

Johan a gagné Paris-Roubaix, une des marques ultimes des grands Flandriens, et il sait ce que frotter veut dire. Hier, la chute, terrible, l’a jeté à 80 kilomètres à l’heure sur l’asphalte de sa Belgique. Le maillot déchiqueté, le dos en sang, il est remonté sur sa machine. Parce que, chez lui, on n’abandonne que lorsqu’il n’y a plus d’autres alternatives. Il a serré les dents et a souffert le martyr. Il s’est accroché par que c’est son métier, sa passion, sa mission.

Demain, l’équipe AG2R LA MONDIALE compte sur lui, le héros de Roubaix, pour guider Romain, Jicé, Alexis et les autres a travers les pièges vicieux des sentes du Nord de la France. Là où il a conquis la gloire, il sera un simple soldat, éclaireur de la brigade légère.

Johan a escaladé le Mur de Huy. Mal au dos, mal aux bras, mal aux cuisses. Mal à l’âme aussi… Qu’importe… Il a franchi la ligne, bu un soda, évité les … tapes dans le dos de quelques spectateurs avant de s’engouffrer dans le bus, vestiaire roulant et refuge des joies et des douleurs .

La vie d’une équipe mélange dans cet espace confiné la joie et la détresse, les rires et les pleurs. Curieux maelstrom qui, au final, doit déboucher sur la victoire…

Deux heures ont passé. Dans sa chambres de l’hôtel Post de Liège, Johan est au massage. De larges estafilades zèbrent son dos. Son genou est enserré dans de la gaze. Il sourit. Demain, il sera sur le vélo. Parce que c’est son métier, sa passion, sa mission…