Respect

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Le Tour est une lessiveuse. Il entraîne le peloton et la caravane dans une sorte de frénésie où les instants se succèdent et s’écrasent. Difficile d’en sortir la tête, un peu comme un nageur pris dans un tourbillon et même la promesse de tenir un blog est rapidement une utopie.

Deux semaines ont passé et Utrecht semble à la fois loin et proche. La Hollande et ses polders, le Nord et ses pavés, la Bretagne et sa douce folie, les Pyrénées et leur charme vénéneux…

Nous voici donc à Millau, ou pas très loin… avec l’impression de feuilleter en accéléré un livre d’images en trois dimensions.

On y voit des paysages, des villes, des campagnes. On y sent les senteurs de la nature ou les odeur de viande grillée. Et puis il y a ces visages souriant, qui agitent la main sur votre passage. Ces « happy faces » de l’été posées sur le bord de la route depuis des heures et simplement heureuses de voir passer un long cortège d’autos et de motos  et, plus fugitivement, une poignée de coureurs.

Le Tour de France est une fête pour des millions de personnes et un calvaire pour quelques dizaines de coureurs. Bien sûr, ce n’est plus l’épopée des Forçats de la route et l’aventure colle désormais à son époque. Formatée au watt près et offerte sous tous les angles aux téléspectateurs de la planète.

Mais la Grande Boucle du 21e siècle reste une suite de morceaux de bravoure, teintés de souffrance et de dépassement.

En une semaine, l’équipe AG2R LA MONDIALE a décliné toute la palette des sentiments. La victoire d’Alexis Vuillermoz au sommet du Mûr de Bretagne, modèle d’intelligence et de force. La difficile traversée des Pyrénées, ambitions et moral en berne. Et aujourd’hui, le choc des sentiments contradictoires. D’un côté, Jan Bakelants à la lutte jusqu’à l’ultime mètre pour la victoire d’étape et Jicé Péraud, en souffrance à l’arrière après une terrible chute.

Image terrible et touchante du champion meurtri dans ses chairs et dans sa peau. Impression poignante lorsque, impuissants, sur la ligne d’arrivée, on compte les coureurs rentrés comme un chef de quart attend ses marins.

Il franchit la ligne, les coudes et  les genoux en lambeaux. Les spectateurs applaudissent et on se lance dans une course folle pour rallier le bus, poursuivi par les hommes micros du monde entier. La souffrance fait partie du métier, relativisent les plus anciens. La souffrance fait vendre. La souffrance fait mal tout simplement…

Sacré métier. Sacrée passion/ Serrer les dents là où le commun des mortels serait en arrêt maladie. « Demain je repars. Si je peux donner un bidon aux copains, ce sera cela de gagné… » Silence. Sourire…

Respect.