GRANDE AVENTURE HUMAINE

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Il m’arrive parfois durant le Tour de France d’avoir envie d’écrire. Simplement pour raconter cette grande aventure humaine, bien plus complexe qu’une liste de résultats ou quelques tweets hâtivement balancés ou pour évacuer les impressions d’une journée à rallonge.
Et puis je me ravise car la vie d’une équipe embarquée pour cet étrange périple doit conserver sa part de mystère et d’intimité. Il me faudrait décrire des instants de vie à la fois dérisoires et profonds, des mots, des regards, des gestes, des larmes ou des silences qui traduisent la dimension épique de cette course qui demeure une des dernières grandes aventures sportives contemporaines. Ce serait entrer par la porte de derrière dans les coulisses de cette existence itinérante et je ne le veux pas. Ce n’est plus mon métier. Ce n’est pas mon rôle.

Ce soir, j’ai simplement besoin d’exprimer combien ces trois semaines au milieu de l’équipe AG2R La Mondiale resteront gravées. J’ai juste envie de tirer mon chapeau aux huit coureurs et la vingtaine de personnes qui de Bruxelles à Paris ont écrit cette saga sans dévier même par vents de face et avis de tempête.
Sur notre livre de route, il y a eu parfois des ratures et du vague à l’âme. Ce n’est pas la chronique lisse d’une histoire sans soucis.
Le cérémonial des Champs Elysées lorsque l’on se tape joyeusement dans la main avant qu’une pénombre de cinéma n’enveloppe quelques pois rouges balancés sur un maillot blanc et un cuissard n’en est qu’une minuscule tranche de vie…

Le sport est éphémère, emporté désormais dans la lessiveuse des réseaux sociaux qui privilégient la vérité de la seconde et le jugement à l’emporte pièce.
Dimanche matin à Rambouillet, garés à coté du bus de Groupama pour qui les portes du paradis se sont refermées violemment, comme celles à battant des saloons des westerns de John Ford, cette relativité de l’exploit m’a encore plus sauté au visage.
La ténacité de Romain, Mika, Tony, Oli ,Benoit , Alexis X 2 et Mathias, capables de puiser au plus profond de leurs corps et de leurs âmes avec force et dévotion pour ramener ce maillot qui me rappelle Lucien Van Impe dans les Miroirs du cyclisme de mon enfance est exemplaire.
L’image de leur arrivée mutique au sommet du Tourmalet est le négatif d’une autre, en couleurs vives et sourires, prise au sommet des Champs hier…
Cette fois, la vraie vie reprend son cours… Mais putain, ce furent trois sacrées semaines…